jeudi 16 mars 2017

Portraits et sagesse 103

Nouri Azgual Baaroun Il parait que notre ami Nouri, comme disait son père « Nouri, Harja wirkaba souri » dans une sorte de glorification pour dire que sa selle et ses étriers sont modernes, s’appelle sur les papiers Mohamed comme tant d’autres de la tribu Baaroun. Mohamed Baaroun l’instit joueur aux échecs, Mohamed l’instit puis émigré, Mohamed le marin, Mohamed le père de Mongi, Mohamed du tourisme, Mohamed l’émigré père de l’autre Mongi aussi, Mohamed le plombier, Mohamed le zaim et d’autres peut être, portent le même nom par bénédiction et dévouement au prophète. Ainsi Si Nouri, le beau cavalier depuis son âge quand son père Si Azgual le chérissait et le flattait dans se petite boutique. C’était lui qui nous fit grandir grâce au morceau de pain badigeonné par du colorant rouge du piment harissa. Une période qui ne donna pas l’occasion à Si Nouri de faire de grandes études malgré les conditions favorables surtout quand son grand frère Si Tahar était un instit et Imam en même temps. Pourtant aucune éducation ne pouvait faire d’un homme une personne aimable, bien respectée et très communicative. Il avait passé une bonne carrière au travail et fit plusieurs amitiés, des grands, des vieux, des marins, des ouvriers et pour passer le temps, il se consacra à la pêche côtière. Il n y avait pas beaucoup de rendement et il lui suffisait de couvrir les besoins de la famille et vendre les quelques poulpes et seiches aux amis. Bien sur, comme pour tout jeune qui se respecte, la mer était l’espace de liberté et le refuge de vie et de survivance, l’endroit où touts ceux qui se barraient de la famille, s’enfouillaient de l’école, sortaient du système unanimiste sans aller trop loin, trouvaient la nourriture et le gite en plein air sur des monticules d’algues soyeuses et confortables jusqu’à la rosée du matin. C’était toujours de bon matin, après une longue nuit de jeu, de descentes sur les vergers, les champs de pastèques et certaines choses, que les gens de Ghannouch, réveillaient tout le monde en trainant leurs lourdes cordes ramenant les filets après quelques heures de traction vers la plage et avec le butin du jour en thon et poisson divers. Le dérangement n’était pas perçu important, car ces pêcheurs faisaient parti de la réalité et les jeunes allaient vers dix heures du matin, pour aider un peu et mériter une quantité de poisson selon la quantité de pêche. Ces gens généreux, louaient des tracteurs à remorques pour transporter le thon vers les frigos de la ville de Zarzis et au passage à travers le village, jetaient aux uns et aux autres de gros poissons. Une vraie aubine pour les familles généralement pauvres de trouver autant de bon poisson durant une semaine de cuisine au bois de palmes et aux crottes de chameaux. En effet, les crottes des chameaux étaient disputées entre les femmes très tôt le matin et constituaient un combustible efficace avec de belles braises énergétiques. D’ailleurs, on raconte que dans la crise mondiale de vingt neuf, des femmes suivaient des caravanes de « Koufa » convoi à travers le désert, juste pour recueillir les grains de d’orge non broyés par les dents des grosses betes et pourraient être récupérer pour la survie des familles. Il parait que c’était des grands parents de Nouri, qui avait été réquisitionné par les colonisateurs pour convoyer le convoi de provisions aux soldats des sables de l’intérieur et qui ne revint jamais et aucune information ne parvint sur lui ni sur ses deux compagnons du village. Auraient-ils aidé clandestinement ses pauvres femmes et condamnés pour cela à la peine capitale comme il en était le cas dans ces conditions d’urgence militaire !!! Bien sur, avec Nouri et à travers lui, on pouvait connaitre de grandes personnalités de la mer et ses activités, surtout quand Maftah, l’homme géant et confiant dominait la plage par sa présence totale que ce soit pour l’exploitation de la mer ou la terre. Avec ses enfants et comme tout habitant de ce village oasis maritime, travaillait à pêcher par les filets et travaillaient aussi la terre par la culture et la cueillette des quelques olives de survie. Maftah, une figure de surhomme, costaud, à la grande gueule, n’avait pas du tout froid aux yeux et faisait même des Issawia où il fallait manger des scorpions vivants, marcher sur le cactus à épines ou danser frénétiquement pour parvenir à la transe et peut être guérir ainsi certains de leurs malaises mentaux. Dans les réunions politiques de l’après indépendance, Maftah était toujours présents et exigeait bruyamment ses droits au point de voir le politique local sur le podium, souffler à l’illustre venant de la capitale de ne pas faire attention l’amenait à douter de la probité et la santé mentale de ce rebelle naturel. On raconte, un jour, quand Maftah attrapait le poisson avec ses enfants, il y eut une dispute entre eux au sujet des parts, car chacun commençait à constituer une famille, Maftah jeta les caisses pleines de poulpes et de seiches à la mer en leur disant que comme ça ils pourront continuer à se chamailler librement. Si Nouri avait eu aussi la chance de connaitre Si Ameur Hnid, surnommé Fistou, un grand homme, tanné par le soleil, qui regardait à travers un seul œil et rarement utilisant l’autre, avec un rictus satisfait permanent montrant une dent en argent scintillante des années soixante, un verbe joyeux communicatif surtout quand il rencontrait son ami Sahmimi, surnommé Jo, pour lui vendre les produits de sa pêche qu’il revendait au détail auprès des gens sur la route. Ce marchandage durait assez longtemps et comprenant un grand rapport de force sympathique. Bien sur, Sahmimi, était presque toujours perdant et dans un comportement populiste et humain, se laissait faire au point d’accuser toujours des pertes sèches. Plusieurs chanceux, dont Nouri assistèrent à ce duel de marchandage pour faire gagner deux dinars pour l’un ou pour l’autre. Fistou devait céder pour garder son distributeur et vendre vite avant l’effet du soleil sur le poisson et Sahmimi devait aussi acheter vite pour parvenir aux clients avant les cuissons des déjeuners, ce donnait que ce dernier était presque toujours le premier à lâcher la querelle sur le prix. Il fallait le voir en train de guider sa bicyclette avec deux caisses à l’arrière, traversant les rues du village en train de crier « Hout, Hout » pour se retrouver encore une fois devant le marchandage des pères de familles ou des femmes seules. Bien sur, l’odeur du poisson, dans une société à mentalité féodale et traditionnelle, la tendance générale à préférer les produits de la terre sur celles de la mer au point d’en faire des symboles importants dans les rituels religieux, était en se défaveur et perdait à chaque transaction au point de revenir sur son petit fond de roulement qu’il renouvelait par des emprunts auprès de connaissances bienfaitrice. Ainsi, Nouri, Fistou, Sahmimi, passèrent de bon moment, enlevés au temps et malgré que les deux derniers sont morts, ils restent encore vivants sur la plage et dans la mémoire collective. Nouri, le cavalier du village, l’ami constant de toutes les amicales sociales, les présent dans toutes les manifestations locales…était aussi un grand joueur au domino et il lui suffisait un bon partenaire et coéquipier pour gagner touts les autres des régions de Zarzis. Il gagna plusieurs prix dans des concours de jeux organisés pars les festivals, sans le moindre essai pour passer aux jeux d’échecs, malgré qu’en regardant certaines partis, il proposait des équations étonnantes. Respect et reconnaissance à Si Nouri, Si Fistou, Si Sahmimi, Si Maftah et Mohamed Baaroun puisqu’ils sont plusieurs à porter ce nom. Lihidheb Mohsen 17.03.17.

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