dimanche 5 avril 2015

Boughmiga, à Nalout.

A partir du poste frontalier de Dehiba-Ouazen, la route commence à monter entre les montagnes et les ravins vertigineux dans un paysage aride et jaune ocre, ponctué par de petits vallons de verdure où quelques oliviers attendent une pluie qui tarde pendant des années. Peu habitué à la hauteur, Boughmiga, conduisait difficilement mais sans le manifester. Le convoi s’arrêta au sommet de la montagne pour regarder toute la plaine du Djeffara au dessous, sur une distance de plusieurs dizaines de kilométres où les palmiers paraissaient comme des points insignifiants, les villes comme des taches blanches et les montagnes comme des mottes de terre. Nalut, une ville berbère arabisée, est un nid d’aigles, au sommet d’une falaise. Le plus ancien Ksar, en partie restauré, est un chef d’œuvre d’architecture traditionnelle, celle de la survie, de l’exploitation des espaces, celle qui joint le sécuritaire à l’utilitaire et surtout le confort relatif vis-à-vis du climat extrême. L’art y est aussi manifeste mais sans tapage et exhibition. L’accueil des gens était exemplaire et les débats étaient à la hauteur. Quelques approches, peu communes, émanaient de la spécificité de l’identité locale, comme le fait de parler aisément de la période post islamique ou la référence sans équivoque à la langue et la culture Amazigh. Ce qui était enrichissant et un plus incontestable à l’Islam et la culture Arabe. Bien sur, l’Amazighisme en vogue est parait-il manifeste chez les jeunes mais reste contenu par la sagesse millénaire de la région. Le déjeuner était un régal autours d’un couscous et les portions de viande étaient largement suffisantes, même pour un ogre comme Boughmiga. Les Dames qui nous accompagnaient, ont été dirigées vers un autre salon où elles prirent le repas, sans parvenir à joindre les femmes locales, ni celles qui firent la cuisine malgré une demande pour les remercier. Une société d’hommes, où peut-être comme à Zarzis, les femmes auraient un monde intérieur, exclusif et riche, squatté et délimité pour leur intra-émancipation et affirmation. Mais comment le savoir !! Envoyer un drone ou un robot interstellaire !! De toutes les façons, ce serait génial si elles ont leur propre monde, comme il se doit et défendent leur droit à la vie. Une visite au musée des dinosaures, placé dans une salle du croissant rouge local, nous a permis de constater la richesse de cette région en la matière. Tôt le matin, Boughmiga, se faufila dans les ruelles de l’ancienne ville afin d’assister en live au levé du soleil. Il faisait froid et le vertige l’obligeait à coller son dos à la muraille du ksar en poussant relativement fort vers l’arrière. Cet attouchement vital, lui permit de pressentir comment la vie s’animait en cet instant, les voyageurs, les chameaux, les fellahs, les esclaves, les cris des enfants, le cri des coqs, des ânes, les appels et les échos revenant de la vallée… le murmure de la source, loin en bas, dans le vallon, vers laquelle il y aurait un passage clandestin pour s’en approvisionner en cas de blocus ennemi. Enfin, la lumière annonça le soleil au dessus des courbes du plateau de montagne en forme nette de vagues et Boughmiga du détourner les yeux à cause de l’intensité des rayons, qui parait-il sont moins intenses lors d’un levé de soleil sur la mer. Le paysage était grandiose, les couleurs se mirent à se manifester et des ombres se dessiner, mais l’ambiance fictive et conviviale se dissipa et il du, trouver un autre moyen de communication avec ses ancêtres. Il compta cent soixante deux trous sur la roche constituant le forum social du Ksar, des trous creusés par le broyage des noyaux de dattes à l’usage des chameaux. Certainement, il n y avait pas autant de rigueur avec la femme et elle participait aux travaux journaliers et emplissait l’endroit par les commérages, les chants et la poésie. L’endroit surveillait toute la vallée et le mouvement des caravanes, des paysans et des guerriers comme sur un écran. En rentrant à l’hôtel pour le petit déjeuner, Boughmiga passa par le ksar et visita l’école coranique ou ce qu’il en resta et contempla les signes et symboles sur les murs. Il parait que le Ksar de Nalout, était autonome et pouvait s’auto suffire pour quelques mois grâce aux silos appropriés à toutes les denrées alimentaires, blé, orge, lentilles, figues seiches, dattes, les jarres encastrées pour l’huile et les citernes de récupération de l’eau de pluie. Avec la falaise, plusieurs barrages de toutes sortes protégeaient le ksar des éventuels assaillants. A partir de l’hôtel, le panorama du Ksar était aussi unique et sur la terrasse, Boughmiga, offrit aux Nalouti, une tête de dauphin et une tête de tortue, en guise de symbole de la sagesse de la mer et une invitation au respect de la nature et du vivant ( !). La visite était très réussi et les échanges d’idées étaient fructueux et promettant entre les associatifs du Sud Tunisiens et les intellectuels locaux, pour un monde meilleur. Lihidheb mohsen

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