jeudi 30 avril 2020

Oum Koulthoum

Malgré le grand respect à la cantatrice, à la diva, à l’idole de toute une génération de stupéfaits…, ce nom avait été donné au vent fort par les pêcheurs, par son souffle, sa rythmique, sa redondance et le fort débit de son action… cette bourrasque ne vint que tôt le matin, surprenant les dizaines d’embarcations en train de relever leurs filets du fond marin. Quand je parvins à la mer, pour ma marche quotidienne, moi le fils de paysans pauvres de l’oasis maritime, ils étaient déjà dans la petite baie naturelle, ballotées par les vagues et survolées par des dizaines d’oiseaux marins se disputant le poisson pourri nettoyé des filets. Il y avait deux jeunes hommes par barque, quelques foi une seule et tout le monde était appliqué à récolter les crevettes royales que les grossistes des voitures frigos venaient l’acheter à des prix qui seront fixés plus tard selon le marché. Il faut dire que ce produit de la mer était inconnu de la région et négligé au profit de la pêche aux éponges, un produit noble et onéreux. La société traditionnaliste à caractère agraire et pastoral, n’aimait pas la consommation des crevettes avant que la technique des filets au fond de la mer et sa demande par les restaurants modernes ne deviennent en vogue de jour en jour. Oum Koulthoum chantait toujours, le vent ventait très fort et chaque mouvement devenait pénible surtout quand il fallait faire descendre des tas de filets ou des hommes pour terminer le nettoyage sur le bord de la mer. Généralement, en plus des crevettes, il y avait aussi quelques seiches, des poulpes et du poisson. Il parait que les crevettes sécrétaient un certain liquide qui dépréciait la qualité du poisson et le rendait flasque et peu comestible. Les oiseaux voltigeaient et tournaient toujours au-dessus de la crique et piquaient quelques fois sur leurs proies jetées en mer par les pêcheurs. L’un des gars avait déposé difficilement son collègue avec les filets sur la plage et quand il devait remettre l’embarcation en mer et l’ancrer convenablement, les vagues étaient énormes et même en tirant vigoureusement sur les rames, le canoé restait sur place et ne bougeait presque pas. A la fin, il du rallumer le petit moteur pour s’en sortir au risque d’enliser l’hélice dans les cordes des amarres. De sont coté, notre ami le pêcheur non voyant, aussi performant que les autres, avec un plus incontestable d’endurance et d’application, venait de terminer ses propres filets et entrepris d’aider les autres à remettre leurs barques en place et du entrer dans l’eau jusqu’au coup. Après cette prouesse et ce courage, il monta avec un pêcheur seul sur son embarcation pour l’aider à finir son travail. Ainsi, au rythme de la symphonie, au souffle du vent, à la violence des vagues, à la dance des embarcations, aux cris des violoncelles volants sur les têtes, des hommes font ce que devraient faire les hommes, pour de bon, et transformaient les produits de la mer en richesse, pour un monde meilleur… Lihidheb Mohsen éco artiste

dimanche 26 avril 2020

La raie et ses enfants....

Aujourd’hui 26.04.20, en confinement et en jeûne…, entrepris assez tôt ma marche soliloque au bord de la mer. Je ne risquais pas de rencontrer personne et quand ça arrive, le respect de deux mètres de distanciation était respecté. Normalement, pas plus que deux personnes, avec qui je discutais à distance des problèmes du jour, corona, rapatriements, déboires de l’ARP, l’éloquence du président et bien sur les livres qu’on était en train de lire… Le climat était à la tempête et aucun marin ne mit ses filets en mer, seules les embarcations flottillaient sur les vagues houleuses et au gré du vent. Dans une sorte de mouvement d’ensemble, légèrement en décadence causée par les vagues, il y avait dix huit petites barques en plastique, avec leurs moteurs hissés à l’arrière. Il n’y a plus de canoés construits en bois et le domaine a été investi rapidement par l’industrialisation et la motorisation. Une invasion rapide, qui transforma toute l’activité, dans le sens de la surexploitation, la rapidité, la surpêche et la possibilité de mettre les filets à deux reprises par jour ou en mettre plusieurs aux levés consécutifs. Il y a même un non voyant qui travaillait vigoureusement à la force de ses bras et sa lucidité dans le positionnement des choses et des mouvements. Il faut dire qu’il avait aussi travaillé quand les embarcations étaient encore en bois et excellait avec les rames, au point d’acquérir le niveau et statut d’un élément normal du groupe. Je continuais donc mon chemin, recevant le vent en face tout en marchant lentement pour ne pas suer et avoir des risques pour la santé. Pourtant, il y avait un sentiment amer, quand j’ai constaté l’oubli de mon portable à la maison et ne pouvais prendre de photos. Quand je parvins au deuxième attroupement d’embarcations au long du village, il y avait des pêcheurs qui avaient risqué leurs filets dans cette tempête. Ils étaient trois, et tout en sortant leur canoé vers le sec, continuaient à démêler leurs filets, des herbes marines et des carabes bleus. On a pu conster comment ce crustacé invasif et nuisible pour les pêcheurs, diminuait en nombre et aurait atteint le pic de sa prolifération. « Comme la corona peut être ». Mais la prise la plus importante était une raie géante de cent vingt kg au moins, qui devrait être transporté vers les frigos du port et la vendre demain à la criée. Sans pouvoir prendre photos, j’ai pu constater combien de poissons avec les filets, avaient été engloutis par la raie et certains pêcheurs avaient manifesté leur joie de s’être débarrassé d’un concurrent qui leur chipait les seiches directement des filets en mer. Mon émotion était grande, quand j’ai vu des petits de cinq centimètres sortir de son ventre et paraissaient déjà sans vie. Comme toujours, le bonheur des uns est le malheur d’autres, ainsi de suite. Les cormorans blancs voltigeaient au-dessus de nos têtes, à happer au vol ou se précipiter sur les poissons pourris que les pêcheurs leur jetaient. Il y avait aussi deux chats, plus calmes et reniflaient dédaigneusement le poisson jeté et les crabes encore vivantes. Ainsi, soit-il, des morts, des vivants, des morts pour des survivants, des survivants grâce aux autres, une série de violences à l’aller et au retour, une série interminable d’inter dépendances… Mais quand même, haïr une raie ou un dauphin pour leur picorage directement des filets en mer, aurait une réponse glaçante et définitive, disant que ce ne sont pas ces animaux qui sont sorti sur la terre pour nuire aux hommes et c’est bien le contraire. Lihidheb Mohsen éco artiste